Au cœur des montagnes rocheuses et des routes sinueuses de l’Anatolie, dans la région de la Cappadoce, Aydin (Haluk Bilginer) est un comédien à la retraite vivant avec sa femme Nihal (Melisa Sozen) et sa sœur Necla (Demet Akbag) dans un hôtel troglodyte qu’il gère avec Hidayet (Ayberk Pekcan), son homme de main. Dans ce lieu reclus et presque complètement coupé du monde au fur et à mesure que l’hiver s’installe et que la neige recouvre la steppe, Aydin doit affronter l’éloignement sentimental de son épouse et les critiques acerbes de sa sœur sur sa manière de vivre. En cette période propice à l’isolement et à la réflexion, l’hôtel devient progressivement le théâtre de leurs disputes et de leurs affrontements.

Plusieurs fois primés à Cannes notamment du Prix de la mise en scène pour Les Trois Singes en 2008 ou du Grand Prix en 2011 avec Il était une fois en Anatolie, Nuri Bilge Ceylan a décroché la récompense suprême, la Palme d’Or, avec Winter Sleep lors de la 67ème édition du Festival en mai 2014. Une consécration méritée pour le réalisateur turc qui continue ici d’explorer les états d’âme d’un couple en perdition à l’instar de son quatrième film (Les climats en 2008), d’analyser la psyché de ses personnages névrosés et de sonder l’état actuel de la société turque dans toute sa complexité.

Cette complexité, c’est ce qui caractérise le septième long-métrage de Nuri Bilge Ceylan qui a co-écrit avec sa femme Ebru Ceylan le scénario en s’inspirant des nouvelles de Tchekhov (Ma femme, Braves gens) et de la filmographie de Bergman (Scènes de la vie conjugale). On retrouve effectivement l’atmosphère âpre et glaciale de l’écrivain russe et du réalisateur suédois dans ce film dense à travers les longues conversations philosophiques et les questionnements psychologiques entre Aydin, sa femme et sa sœur.

Rythmé par la vingtième sonate pour piano de Schubert, Winter Sleep est une fresque intense qui dure plus de trois heures, un temps nécessaire pour installer et montrer progressivement cette complexité des relations qui lient les différents personnages entre eux. Une plongée au plus profond de la conscience humaine ; un regard noir et souvent cynique, presque misanthropique sur les Hommes et leur condition mais toujours sublimé par les paysages de la Cappadoce dans lesquels le réalisateur turc est parvenu à créer une ambiance feutrée et mélancolique grâce à une photographie soignée. Un sommeil d’hiver particulièrement mélancolique dans lequel on prend plaisir à s’abandonner pendant ces longues heures d’hiver. 

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