Il y a dans la filmographie de François Ozon deux catégories de longs-métrages que le réalisateur semble affectionner particulièrement. D’un côté, on trouve des comédies bien huilées avec des acteurs (et surtout des actrices) connu(e)s et reconnu(e)s par la profession à l’image de Catherine Deneuve, Karin Viard, Isabelle Huppert ou encore Fanny Ardant respectivement dans Potiche (2010) et Huit femmes (2001). De l’autre côté, ce sont des films plus expérimentaux et intimistes auxquels s’est essayé le réalisateur français avec plus ou moins de succès et qui ont permis de révéler des acteurs (et de nouveau des actrices) à l’instar de Marine Vacth dans le mystérieux Jeune & Jolie sorti en 2013.

© Mars Distribution

Le quinzième long-métrage de François Ozon est à la croisée de ces deux mondes. Une nouvelle amie parvient à allier un casting remarquable entre le trio Romain Duris, Anaïs Demoustier et Raphaël Personnaz à un scénario soigné et pertinent qui invite le spectateur à réfléchir sur une question contemporaine de plus en plus présente depuis plusieurs mois dans le débat politique actuel qui anime notre société sur la notion du genre, de ses effets et de ses conséquences dans notre manière de vivre ensemble.

À la suite du décès de sa meilleure amie Laura, Claire (Anaïs Demoustier) ne parvient pas à se remettre du drame qu’elle vit et plonge dans une profonde dépression. En se rendant un jour dans la maison de son amie défunte, elle découvre par hasard que le mari de Laura se travestit en femme. Pour tenter d’apporter une explication logique à cette attitude, David (Romain Duris) évoque l’absence laissée par la mort de sa femme pour son enfant mais également pour lui-même. Entre les deux protagonistes commence alors une nouvelle relation où les règles et les conventions traditionnelles sont remises à plat ; où la quête identitaire animera aussi bien David que Claire.

© Mars Distribution

En rebattant les cartes avec lesquelles nous sommes socialement habitués à jouer, le réalisateur français parvient à proposer un raisonnement mûri sur cette notion du genre. C’est d’ailleurs dans la bouche de David devenue Virginia au cours d’un déjeuner avec Claire que François Ozon propose sa plus belle réflexion du film sur le sujet : quand sa nouvelle amie lui demande ce que signifie pour elle d’être une femme, Virginia répond : « Tout ce que l’on m’a interdit en tant qu’homme ».

La phrase fait mouche et continuera de nous trotter dans la tête à la fin de la projection parce qu’elle touche un point essentiel que recouvre la notion du genre : comme Céline Sciamma le montrait remarquablement dans son second long-métrage Tomboy (2010), notre identité, ce que nous croyons être profondément n’est jamais une chose purement innée. Elle se forge au fil du temps à travers le regard des autres et est le résultat d’une construction sociale fondée sur des normes et des valeurs acquises depuis notre plus petite enfance. Si ces normes permettent aux individus d’une société de vivre ensemble, elles ne font aussi qu’exclure les personnes qui ne correspondent pas à ces dites-normes.

Dès lors, s’interroger sur ces questions devient essentiel car il s’agit aussi de s’interroger sur notre capacité à savoir accepter la différence et à savoir établir des règles de vie communes qui cessent d’ostraciser ceux qui ne nous ressemblent pas.

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